Non, le perroquet n'est pas seulement un imitateur de talent. perché sur une épaule, il est capable de comportements sociaux réfléchis et de mettre en place des stratégies élaborées grâce à une pure intelligence . Plusieurs scientifiques et biologistes ont étudié les comportements cognitifs de ses oiseaux magnifiques.
Durant prés de 30 ans, Irène Pepperberg, scientifique américaine, a appris à son perroquet Alex, un gris du Gabon devenu une star mondiale, des dizaines de mots, mais aussi de couleurs, de formes, de matières, de chiffres. Cet animal était capable de compter, de déterminer la nature de la matière de l'objet qu'on lui présentait, mais aussi de répondre à des questions, sans se tromper. Et surtout, il utilisait les mots qu'il connaissait à dessein, et dans des contextes précis.
Pour obtenir ces résultats, Irene Pepperberg utilisait le moteur de la frustration : ailes taillées et élevé seul, Alex était obligé de s'exprimer pour obtenir ce qu'il désirait. S'il avait vécu plus longtemps (l'espérance de vie de l'espèce est de plus de cinquante ans), l'animal aurait sans doute pu enrichir encore son vocabulaire.
En travaillant avec plusieurs spécimens, Dalila Bovet a d'abord constaté la spontanéité de leur apprentissage. « Zoé, Léo et Shango ont capté des mots et des situations qu'ils ont su replacer dans des contextes à-propos, explique la biologiste. Ils nous saluaient par exemple d'un "au revoir" le soir quand nous partions, mais jamais dans la journée quand nous quittions la pièce. Cela laisse entendre que leur pensée précédait les mots qu'ils utilisaient. »
Plutôt que de se focaliser sur l'apprentissage des mots, la biologiste a cherché à comprendre leur langage. Après des mois de travail pour comparer des dizaines d'heures d'enregistrement, Dalila Bovet a fini par identifier une centaine de vocalises, dont un petit nombre renvoyaient à des émotions précises, comme la colère ou la surprise.
Mais, présentés à d'autres perroquets, ces cris ne provoquaient aucune réaction. « Nous en avons déduit que nos spécimens avaient inventé leur propre code de communication en se mettant d'accord pour associer un son à un contexte », explique-t-elle.
Confrontés à des situations complexes, Zoé, Léo et Shango étaient ainsi capables de comportements sociaux réfléchis et de stratégies élaborées. Dalila Bovet leur a par exemple présenté un plateau-repas relié à 2 ficelles pour mesurer leur niveau de coopération. Pour obtenir leur déjeuner, les perroquets devaient tirer chacun un bout. Sans difficulté, ils ont compris la consigne et se sont coordonnés.
Comme pour le primate, le cerveau du perroquet pourrait-il s'être développé sous l'influence du groupe ?
A l'état naturel, les gris du Gabon se rassemblent le soir pour se protéger des prédateurs, mais se séparent ou recréent de plus petits groupes le jour pour chercher de la nourriture. « Cette organisation a pu contribuer au développement d'un cerveau social, car elle demande une souplesse intellectuelle et des capacités de reconnaissance individuelles et de catégorisation pour identifier la place de chaque congénère du groupe dans sa propre sphère », explique Dalila Bovet.
La monogamie de l'espèce pourrait aussi jouer un rôle dans le développement de l'intelligence pour gérer les relations du couple à long terme, ce qui - comme pour les humains -oblige à déployer parfois des trésors d'ingéniosité, de patience ou de négociation.